John McEnroe vs Bjorn Borg : histoire d'une rivalité légendaire

Si le tennis des années 2000 a été marqué par la rivalité entre les trois géants Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic, une autre rivalité a marqué l’histoire de la balle jaune.

Dans les années 70, deux hommes se sont livrés des matchs titanesques, deux tennismen que tout oppose : leur style de jeu, leur comportement et leur personnalité. Le “showman” McEnroe, sulfureux et nerveux, et l”Iceman” Borg, glacial.

D’un côté, il y a le feu. Brûlant, imprévisible et impressionnant : tel était le style de John McEnroe. L’Américain a une approche très offensive avec, notamment, un jeu de service-volée redoutable.

De l’autre, il y a la glace. Froid, calme et efficace : rien ne peut atteindre Bjorn Borg. Surnommé “Iceborg” en raison de son tempérament qui ne laisse rien paraître, le Suédois est connu pour sa défense et son jeu de fond de court.

Tout commence en 1978. Bjorn Borg est déjà une terreur sur le circuit puisqu’il a remporté son premier Roland Garros en 1974, à seulement 18 ans. En 1975, il réitère son exploit avant de remporter Wimbledon en 1976 et 1977. 

Bjorn Borg a alors 22 ans et quatre titres du Grand Chelem. Quant à McEnroe, il a seulement 19 ans et n’a accroché aucun titre majeur à son palmarès, excepté une demi-finale à Wimbledon en 1977. 

En 1978, les deux hommes s’affrontent pour la première fois et, à la surprise générale, c’est John McEnroe qui éteint Bjorn Borg en deux sets 6-3, 6-4, en demi-finale à Stockholm.

Malgré cette défaite, l’année 1978 sera celle de Bjorn Borg puisque le Suédois remporte Roland Garros et Wimbledon pour la troisième fois. Le Suédois semble intouchable et roule sur le circuit.

Une seule personne semble capable de l’arrêter : John McEnroe. Vainqueur de l’US Open 1979, l’Américain se fait un nom sur le circuit et commence à montrer au monde son talent… et sa nervosité légendaire. 

En 1980, Bjorn Borg et John McEnroe se sont affrontés sept fois, pour quatre victoires du Suédois. Dès le début de saison, “Iceborg” remporte Roland Garros et vise un cinquième doublé “RG - Wimbledon".

Sauf que, sur sa route, il y a John McEnroe. L’Américain vise un premier succès sur le gazon londonien et affronte son plus grand rival en finale. Ce match entre les deux hommes est considéré par les amateurs de tennis comme l’un des plus grands de l’histoire.

Tout y est : l’enjeu, la tension et le poids de l’histoire. Bjorn Borg est favori mais va subir la tornade McEnroe dans un premier set à sens unique : 6-1. L’Américain est sur un nuage et récite son tennis.

Dos au mur, le Suédois va se réveiller et remporter les deux sets suivants : 7-5, 6-3. Le quatrième set va marquer les esprits puisque McEnroe va pousser Borg au tie-break. Si “Iceborg” gagne ce jeu décisif, la partie est terminée.

Avec un mental d’acier, John McEnroe va sauver sept balles de match et finalement remporter ce tie-break 18-16. Un moment légendaire, de 22 minutes, qui va pousser les deux hommes dans un cinquième set enflammé.

Finalement, après un combat acharné, c’est Bjorn Borg qui l’emporte 1-6, 7-5, 6-3, 6-7, 8-6. Un match de très haut niveau qui va placer la rivalité entre les deux hommes à son paroxysme.

Quelques mois plus tard, les rivaux se retrouvent en finale à l’US Open. Le chouchou du public, John McEnroe, remporte pour la deuxième fois le Grand Chelem américain à seulement 21 ans, en battant le Suédois en cinq sets, dans un match d’anthologie. 

En 1981, les deux hommes sont à l’apogée de leur tennis : Bjorn Borg a 25 ans et McEnroe 22. Le Suédois remporte son sixième Roland Garros (à 25 ans !) et part une nouvelle fois favori pour le doublé avec Wimbledon.

De son côté, John McEnroe est plus nerveux que jamais. Au premier tour du Grand Chelem londonien, l’Américain affronte son compatriote Tom Gullikson. Alors qu’il mène 5-4 dans le deuxième set, le gaucher est au service.

Il vient alors d’exploser sa raquette après une annonce d’un juge de ligne et est plus tendu que jamais. Il sert alors et claque un ace mais le juge de ligne donne la balle faute. Pourtant, celle-ci est bien bonne.

L’arbitre du match, Edward James, essaie d’expliquer la situation à John McEnroe : sans succès. L’Américain dégoupille et se lance dans une tirade légendaire : "Vous n'êtes pas sérieux. Vous ne pouvez pas être sérieux !! La balle était sur la ligne. La craie a volé. Elle était clairement bonne.”

Devant tout le stade, McEnroe ne décolère pas : “Comment pouvez-vous l'annoncer faute ? Combien vous allez en rater ? Tout le monde a vu qu'elle était bonne. Tout le stade. Et vous l'annoncez dehors ? Expliquez-moi ça, voulez-vous.”

Malgré ce craquage, il s’impose en trois sets et arrive en finale contre Bjorn Borg, toujours aussi calme, lui. Sous les sifflets du public britannique, John McEnroe s’impose en quatre sets. 

Une performance qu’il va réitérer en finale de l’US Open cette même année contre ce même Bjorn Borg, portant le score de leur confrontation à 7 partout. Malheureusement, cette finale sera le dernier match entre les deux hommes.

Après cela, Bjorn Borg va expliquer qu’il n’était plus motivé pour jouer : “Je sais que cela paraît fou, mais je n'ai absolument pas été déçu (par sa défaite à Wimbledon en 1981). De retour au vestiaire, je n'étais pas triste. C'était étrange.”

Très simplement, “Iceborg” explique : “Lorsque je suis rentré à l'hôtel, je n'ai plus repensé à la défaite. J'ai alors réalisé que quelque chose ne tournait plus rond. Ce scénario s'est répété à l'US Open, quelques mois plus tard.”

“Après la victoire de John McEnroe, j'ai directement filé à la maison que je possédais alors à Long Island. J'ai sauté dans la piscine comme un vacancier. Là, en me prélassant, j'ai réalisé que la motivation n'était plus là. Ce jour-là, âgé de 25 ans, j'ai décidé d'arrêter ma carrière. Décision que je n'ai jamais regrettée. J'ai été numéro 1, devenir numéro 2 ne m'intéressait pas.” 

En 2017, le film Borg McEnroe retrace l’histoire de cette rivalité légendaire entre les deux hommes. Un duel entre deux jeunes joueurs, brillants, que tout oppose. Une rivalité qui rappelle, en quelque sorte, celle entre Roger Federer et Rafael Nadal des années après.