Comment Raymond Poulidor est devenu le chouchou du Tour de France ?
Certes, un proverbe affirme que l'histoire ne retient que les gagnants. Pourtant, l'homme dont on va parler aujourd'hui n'était pas reconnu pour cette qualité… au contraire. Affublé de l'étiquette de "l'éternel second", Raymond Poulidor, dit "Poupou" a écrit sa propre histoire.
Au temps des grands Eddy Merckx ou Jacques Anquetil, qui ont remporté dix éditions à eux deux, il fallait toujours un outsider, celui qui motive les vainqueurs et les pousse à se surpasser.
Malheureusement, ce challenger était Raymond Poulidor, surnommé “Poupou” par le public français. Adoré par tous les spectateurs, le Français était apprécié pour sa sympathie, son sourire et son style de course.
Très offensif, il n’hésitait pas à tenter sa chance pour déranger les meilleurs. Raymond Poulidor s’est rapidement imposé comme le visage du “panache à la française” : perdre oui, mais perdre en beauté.
Au cours de sa carrière, le coureur a participé à 14 reprises au Tour de France. En 14 participations, il a terminé huit fois sur le podium dont trois fois à la seconde place et… aucune fois à la première.
C’est simple, “Poupou” détient le record de podiums sur la Grande Boucle mais n’a jamais porté le maillot jaune une seule seconde. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé.
Pourtant dans ses défaites, il y a également de magnifiques victoires. Au cours de ses 14 participations, Raymond Poulidor a remporté sept étapes, dont la première en 1962 et la dernière en 1974.
Au cours de sa carrière, le cycliste a affronté les meilleurs et une rivalité a marqué les esprits : celle avec Jacques Anquetil, un autre coureur français. Tout commence en 1961, quand Raymond Poulidor refuse d’être équipier de son coéquipier lors du Tour de France.
Alors champion de France, “Poupou” souhaite disputer le Tour pour le remporter. Les deux hommes se retrouvent finalement en 1962 mais Jacques Anquetil est bien trop fort. Il remporte deux étapes et Raymond Poulidor finit troisième.
Il faut attendre 1964 pour qu’une vraie bataille soit livrée entre les deux hommes. Jacques Anquetil vient de remporter le Tour d’Italie et Raymond Poulidor le Tour d’Espagne : les deux hommes sont à leur apogée.
Anquetil a déjà remporté quatre fois la Grande Boucle et pourrait devenir le premier homme à en remporter un cinquième. Il réussit à prendre une minute d’avance sur son rival dans les Pyrénées et arrive confiant dans les Alpes.
Dans la dernière étape de montagne, au Puy-de-Dôme, Poulidor va lâcher Anquetil, et s’envoler. Malheureusement, malgré tout son panache, il reprend 42 des 56 secondes de son retard.
Finalement, c’est Jacques Anquetil qui s’impose, remportant son cinquième Tour de France. Cette deuxième place accentue la popularité de Poulidor, qui n’aura jamais abandonné. La rivalité va diviser la France et refléter toute la dualité du pays.
Dans son livre Histoire du Tour de France, Jean-François Mignot reprend les dires de l’historien Michel Winock : “Derrière ces deux stéréotypes, le public sent confusément que deux univers s'opposent, comme la modernité et l'archaïsme. Anquetil est représentatif d'une agriculture moderne. [...] Poulidor est la figure du "paysan résigné", qui ne se fait pas d'illusion.”
À l’instar de la rivalité entre Gino Bartali et Fausto Coppi, celle entre Raymond Poulidor et Jacques Anquetil a divisé toute une nation. Malheureusement, dans cette rivalité, il n’y a eu qu’un vainqueur.
Dans sa carrière, “Poupou” a tout de même remporté 189 courses dont Paris-Nice, Milan San-Remo, la flèche Wallonne ou encore le Tour d’Espagne 1964. Malgré cela, il n’aura jamais réussi à revêtir le maillot jaune et restera, à jamais, “l’éternel second”.