Freddy Maertens, le diamant oublié de la génération Eddy Merckx
Quand on évoque les meilleurs sprinteurs de l'histoire du cyclisme, on pense souvent à Mark Cavendish, Peter Sagan ou encore Erik Zabel. Pourtant, dans cette discussion, il y a un nom qui est fréquemment oublié : Freddy Maertens.
Véritable prodige du sprint, le coureur belge a alterné les saisons exceptionnelles… et d'autres très moyennes. Irrégulier et brillant, voilà la définition du génie talentueux, mais pas assez sérieux.
Des exploits, Freddy Maertens en a réalisé plusieurs. Son plus grand ? Indéniablement la Vuelta 1977, où il remporte 13 des 19 étapes, ainsi que le classement général. Un record qui ne sera (très probablement) jamais égalé, selon bikeraceinfo.
Mais alors, comment un coureur avec un tel potentiel a-t-il pu être oublié ? Retour sur l'histoire de Freddy Maertens, le génie méconnu du cyclisme belge.
Freddy Maertens naît le 13 février 1952, à Nieuport, en Flandres-Orientales. Fils d'un couple de travailleurs de la classe moyenne, selon le livre Freddy Maertens : L'album d’une carrière phénoménale, il est surtout élevé par son père, Gilbert, une personnalité très dure.
Selon l'auteur du livre, Rik Van Walleghem : "La formation que Maertens vécut avec son père était dure. Terriblement dure. Gilbert ne perdait jamais de vue son fils. Il savait combien de fois et comment son fils s’entraînait, ce qu'il mangeait et buvait, combien de temps il dormait, avec qui il sortait."
Gilbert Maertens était si strict qu'il avait également le contrôle sur les relations de son fils : "Il imposait un régime impitoyable. Il avait un œil ouvert sur la moindre chose qui pourrait gêner la progression de son fils. Il s'inquiétait, par exemple, que les hormones mâles de Freddy prennent le meilleur sur son fils, le conduisent dans les bras de charmantes jeunes filles."
C'est en 1966, à 14 ans, que Freddy Maertens participe à sa première course. Le jeune homme apprend vite et, en 1968, il remporte 21 courses dans l'année, explique Rik Van Walleghem. Cette année-là, il demande à son père de quitter l'école pour se concentrer sur le cyclisme, une requête acceptée par son père, à condition que son fils s'entraîne plus que jamais.
Entre 1970 et 1971, le Belge remporte plus de 50 courses, dont le championnat national amateurs. Lors des Mondiaux amateurs, il s'incline au sprint, seulement battu par le prometteur Régis Ovion, vainqueur également cette année-là du Tour de l'Avenir.
Malheureusement, des tensions entre Gilbert Maertens et certains membres de la fédération belge de cyclisme vont freiner la progression du jeune homme, qui va décider de s'entraîner avec son père à partir de la saison 1972. Il devient professionnel cette année-là.
Vient alors le moment de choisir sa première équipe, sauf qu'encore une fois, Freddy Maertens n'a pas vraiment son destin entre les mains : "J'aurais préféré aller chez SCIC et Colnago, mais mon père m'a dit : 'Tu dois faire quelque chose pour nous aussi'", rapporte bikeraceinfo. Le jeune homme signe alors chez Flandria en 1973.
Dès ses débuts chez les pros, Maertens démontre un fort caractère, ne se laissant pas impressionner par les grosses têtes du peloton, dont Eddy Merckx (en photo). Des tensions vont naître entre les deux hommes dès la saison 1973.
Cette année-là, alors qu'ils sont tous les deux dans la formation belge aux Mondiaux, ils vont se livrer une petite guerre. Alors qu'ils étaient favoris et en position pour un doublé, ils ne vont pas collaborer et perdent le titre au profit de l'Italien Gimondi. Cette course va encore plus isoler Maertens, qui se met tout le clan Merckx à dos.
De 1974 à, 1976, Freddy Maertens enchaîne les succès : Gand-Wevelgem, le Tour d'Andalousie (en remportant huit étapes), le Tour du Luxembourg, Paris-Bruxelles, Paris-Tours, les Quatre Jours de Dunkerque… Mais c'est en 1976 que sa carrière prend un nouveau tournant.
Avec Eddy Merckx sur le déclin, Freddy Maertens est le grand favori des Mondiaux 1976. Après avoir contrôlé les attaques de tous ses adversaires, le Belge règle Moser au sprint pour s'offrir son premier maillot arc-en-ciel. La consécration !
Six étapes de Paris-Nice, la Flèche Brabançonne, l'Amstel Gold Race, Gand-Wevelgem, huit étapes sur le Tour de France, le maillot vert… Tout cela, Maertens le remporte en 1976. Il n'y a aucun doute, il est le meilleur coureur du monde.
L'année 1977 est du même acabit, voire mieux encore. Il remporte 13 des 19 étapes du Tour d'Espagne et s'offre son premier Grand Tour. Il devient également le détenteur de victoires sur les Grands Tours en une année (20), avec sept étapes sur le Giro.
Malheureusement, les problèmes de Freddy Maertens vont commencer à prendre encore plus de place dans sa vie, et particulièrement deux soucis : ses dettes et sa dépendance à la boisson, rapporte Rik Van Walleghem. L'année 1978 sera plus compliquée pour le Belge, avec deux victoires sur le Tour et un maillot vert.
Sans un mentor fort, le Belge traverse deux années comme un fantôme. Alors que tout semble terminé, il retrouve Guillaume Dressiens, un de ses anciens managers, dans l'équipe 'La Boule d'Or', en 1981.
Ensemble, ils vont réussir l'un des retours les plus fous de l'histoire du cyclisme, puisque Maertens remportera le maillot vert du Tour et les championnats du monde cette année-là.
Ces deux succès seront ses derniers coups d'éclats, l'auteur Olivier Dazat expliquant : "Ses employeurs l'ont licencié et d'autres l'ont engagé pour bénéficier de la publicité. Freddy, qui oubliait souvent d'aller aux courses, s'est à nouveau fait virer. La presse et ceux qui l'entouraient lui demandaient d'arrêter." Il prend sa retraite en 1987, après une carrière immense, mais si irrégulière.
Au total, Freddy Maertens aura remporté 142 victoires professionnelles, dont 45 lors de la saison 1977. Il gardera des records intouchables, comme ses 13 victoires en un seul Tour d'Espagne. Seul manque à son palmarès ? Les classiques, même s'il aurait pu remporter le Tour des Flandres en 1977, mais cela, c'est une autre histoire !